L'APPAREIL FIBULAIRE 200
INTRODUCTION
1/ Définition
Les muscles fibulaires, court fibulaire et long fibulaire (naguère appelés court péronier latéral et long péronier latéral), sont deux muscles formant le groupe musculaire externe de la jambe, situés à la face externe du péroné (os nommé aujourd'hui fibula depuis que le grec a été abandonné en anatomie au profit du latin en usage chez les Anglo-Saxons). Ces muscles se terminent par des tendons distincts qui se réfléchissent en bas et en arrière de la malléole externe, prenant une direction sensiblement horizontale pour aller s'insérer sur le 5e métatarsien pour le court fibulaire et le 1er métatarsien, après avoir traversé la voûte plantaire, pour le long fibulaire.
La réflexion des tendons est permise par une gouttière osseuse rétro puis infra-malléolaire fermée en arrière par un rétinaculum, bride fibreuse qui s'insère en avant sur la crête sous-cutanée (palpable) de la partie inférieure de la face externe du péroné et en arrière sur le calcanéum. Le conduit ainsi formé est commun aux deux fibulaires.
On nomme ici appareil fibulaire cet ensemble dont l'intégrité permet l'action effective de ces deux muscles : abduction et éversion pour le court fibulaire, abduction et maintien de la voûte plantaire pour le long fibulaire.
2/ Intérêt
L'escalade moderne expose de façon nouvelle la malléole externe du grimpeur pour 4 raisons :
- On grimpe de plus en plus en chaussons d'escalade sur tous les terrains, là où parfois on grimpait encore en chaussures d'alpinisme qui protégeaient efficacement les malléoles.
- Les chaussons d'escalade à tige haute ont disparu des catalogues des fabricants. Le seul modèle approchant est aujourd'hui le TC de La Sportiva conçu pour les escalades en fissures, qui ne présente qu'une tige semi-haute.
- La gestuelle, plus variée que l'escalade ancienne de face qui exigeait la forte ouverture de bassin d'un Patrick Edlinger, est souvent de profil afin de plaquer davantage une hanche contre la paroi dans les dévers et augmenter l'allonge du bras. Le placement du pied en carre externe est ainsi abondamment utilisé, ce qui place la malléole externe dans une proximité dangereuse avec la paroi.
- Récemment, l'introduction de gros volumes en salle d'escalade a permis de varier davantage encore cette gestuelle, la rendant plus ludique et basée sur l'équilibre, la coordination musculaire plutôt que sur la force brute. Le prix à payer est la probabilité accrue de rencontrer un obstacle en relief pendant une chute.
Classiquement, le pied en carre externe glisse d'une microprise, les prises de main sont lâchées dans un second temps, et la chute se produit sans qu'on ne puisse se repousser de la paroi. Si celle-ci n'est pas en dévers mais seulement verticale ou en dalle (inférieure à la verticale), la malléole externe la frôle dangereusement pendant toute la durée de la chute jusqu'à rencontrer un obstacle. Ceci peut également se produire dans un dévers peu marqué car la corde en se tendant ramène brutalement le grimpeur contre la paroi.
On obtient un choc direct avec toute l'énergie mécanique de la chute sous la malléole externe, dirigé de bas en haut, c'est-à-dire exactement sur l'appareil fibulaire, violemment comprimé entre l'obstacle et l'extrémité inférieure du péroné. L'arrachement du rétinaculum se produit, les tendons des fibulaires pouvant alors s'échapper de leur gaine.
3/ Rappel anatomique : Les muscles fibulaires (ou péroniers latéraux)
Situés à la partie externe de la jambe, les muscles fibulaires servent à la stabilisation de la cheville. Ils rattrapent la torsion interne de celle-ci et ont donc une importante fonction de prévention de l'entorse de cheville. En escalade, ils se contractent de façon très énergique pendant le mouvement de lolotte, permettant le rapprochement de la hanche contre la paroi déversée. En ski, ils interviennent lors d'une brusque prise de carre sur le ski aval.
Le Court Fibulaire (ou court péronier latéral), le plus profond, s'insère par des fibres charnues aux 2/3 inférieurs de la face externe du péroné, à la cloison intermusculaire antérieure qui le sépare de l'extenseur commun et du péronier antérieur, et à la cloison intermusculaire externe qui le sépare du long fléchisseur propre du gros orteil et du soléaire.
Il court le long de la face externe du péroné et se transforme en tendon aplati transversalement pour passer dans une gouttière osseuse (parfois peu marquée, particularité anatomique défavorable) à l'arrière de la malléole externe, la gouttière étant fermée par une gaine fibreuse, le rétinaculum supérieur des fibulaires, commune au long fibulaire. Parfois, le corps charnu descend très bas, ce qui est une autre particularité anatomique défavorable pour la stabilité de ce tendon, car ce volume accru tend à le faire sortir de la gouttière.
Le tendon se réfléchit à angle obtus puis va en bas et en avant , passe au-dessus et en avant du tubercule calcanéun, et s'insère sur le tubercule du 5e métatarsien (petit doigt).
Sa contraction produit l'abduction du pied (mouvement de la pointe de pied vers l'extérieur) et l'éversion (combinaison d'une abduction avec une flexion dorsale de la cheville et une pronation).
Le Long Fibulaire (ou long péronier latéral), le plus superficiel, recouvre le précédent. Il s'insère sur la tubérosité tibiale en dehors de l'insertion de l'extenseur commun, sur les faces antérieure et externe du péroné, sur le 1/3 supérieur de la face externe du péroné, et sur les cloisons intermusculaires le séparant de l'extenseur commun en avant et du soléaire et du long fléchisseur en arrière. Il descend d'abord en dehors du court fibulaire puis en arrière, ce qui laisse à cet endroit le court fibulaire saillant. Il se transforme en long tendon qui entre dans la même gaine que le court fibulaire, où il se réfléchit, puis passe sous et en arrière du tubercule calcanéum (qui sépare donc court fibulaire et long fibulaire), pour se réfléchir une seconde fois dans une gaine fibreuse spécifique, entre dans la gouttière du cuboïde et traverse obliquement la plante du pied pour s'insérer à l'extrémité postérieure du 1er métatarsien (gros orteil) mais en envoyant aussi souvent des extensions au 2e métatarsien.
Sa contraction produit l'abduction du pied et participe au maintien de la voûte plantaire (assuré principalement par le muscle tibial postérieur qui passe sous la malléole interne et vient s'insérer sur le scaphoïde, os saillant à l'intérieur du pied, insertion douloureuse après de longues marches chez les personnes ayant un valgus du pied - pied plat même bien toléré).
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I/ LUXATION DES TENDONS FIBULAIRES
La réflexion des tendons fibulaires, assurée par un tunnel dont la partie antérieure est une gouttière osseuse peu marquée en arrière de la malléole externe et dont la partie postérieure est seulement fibreuse, formée par le rétinaculum supérieur des fibulaires, est donc une zone fragile.
Une contraction violente des muscles fibulaires (prise de carres agressive à ski, mouvement de lolotte dynamique et marqué) est susceptible de déchirer le rétinaculum avec luxation des tendons en dehors et en avant de la malléole. Parfois c'est la répétition du geste sportif qui produit à la longue des subluxations de ces tendons avec un effet « essuie-glace » des tendons contre la malléole externe. A chaque subluxation et à chaque réduction spontanée, le tendon du court fibulaire (le plus profond) frotte contre la saillie osseuse et peut s'effilocher, voire finir par se rompre.
La luxation ou la subluxation des tendons ne rend plus effective la contraction des fibulaires, devenus incapables de mobiliser les 5e et 1er métatarses donc d'assurer leurs fonctions. La marche reste possible avec précaution et boiterie uniquement sur terrain plat strictement horizontal.
Un choc direct sous la malléole externe lors d'un vol banal avec un chausson bas ne protégeant pas cette zone peut entraîner un arrachement immédiat du rétinaculum. L'œdème, qui va durer 3 semaines, va d'abord masquer la présence des tendons fibulaires à l'extérieur de la malléole, et le tout sera diagnostiqué à tort comme une entorse, alors que celle-ci concernerait un plan anatomique plus profond : Le choc direct détruit logiquement d'abord le plan superficiel, donnant la luxation des fibulaires. Une torsion de cheville non contrôlée détruirait en revanche les tissus les moins élastiques, c'est-à-dire les ligaments profonds (entre le péroné et le calcanéum) et la capsule articulaire, donnant l'entorse. Deux pathologies très différentes.
Immédiatement après le choc, une consultation médicale s'impose avec la prescription de radiographies pour écarter une fracture ou un arrachement osseux qui compliquerait le traumatisme. La prescription d'un antalgique et de glaçages peut réduire la douleur mais celle-ci, en l'absence de fracture, est modérée, bien inférieure à celle d'une entorse.
Au bout de 3 semaines, c'est l'accidenté lui-même qui va faire son autodiagnostic en constatant la présence des tendons, mobiles, barrant la malléole externe de manière insolite. C'est ici, sauf diagnostic précoce par échographie, qu'on prend rendez-vous avec un chirurgien spécialisé de la cheville. Ce rendez-vous étant en général tardif (couramment un mois de délai), il va falloir gérer soi-même les jours suivants afin d'arriver dans les meilleures conditions possibles à l'acte chirurgical.
II. LE TRAITEMENT « ORTHOPEDIQUE »
La littérature de la luxation des fibulaires est unanime à considérer que le traitement orthopédique échoue dans l'immense majorité des cas. Il consiste à immobiliser la cheville dans une gouttière de résine plusieurs semaines en espérant que le rétinaculum décollé de l'os se réattache. Il n'est guère aujourd'hui proposé qu'aux sédentaires d'un certain âge qui pourraient se satisfaire d'un rétinaculum partiellement décollé quand l'activité ultime consiste en une promenade sur la terrasse bien plane et horizontale. Pour le sportif, la chirurgie est quasiment systématiquement proposée en première intention, d'autant que le pronostic de cette chirurgie est extrêmement bon quand le cas est simple.
Tout l'enjeu consiste donc à se présenter le jour J avec un cas simple et non un cas complexe avec ténosynovite carabinée voire rupture d'un tendon.
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Une solution personnelle non validée par la médecine : les cales fibulaires.
L'inconvénient principal d'une gouttière de résine est l'impossibilité de vérifier constamment la bonne position non luxée des tendons fibulaires. Attendre 8 semaines avec un tendon souvent luxé dans la gouttière est évidement voué à l'échec. Il faut donc trouver une solution empêchant le plus possible les luxations qui n'interdit pas l'inspection comme la réduction manuelle d'une luxation éventuelle.
Après avoir essayé différents strappings ou orthèses manquant d'efficacité pour empêcher la luxation car insuffisamment rigides, j'ai fabriqué une première cale fibulaire en plastique rigide recouvert d'une feutrine au contact de la peau. Cette cale est plaquée et collée contre la malléole externe à l'aide d'un élastoplaste bien tendu qui ceinture partiellement la cheville pour éviter l'effet garrot. Un autre élastoplaste non tendu (pour éviter l'effet garrot) relie les extrémités du premier morceau (en passant par la malléole interne) pour éviter le glissement. Par tâtonnements, on finit par trouver la meilleure position de la cale pour empêcher la luxation sans nuire à la mobilité de la cheville dans une chaussure basse. L'objectif est de créer un bec prolongeant vers l'arrière la crête externe du péroné pour empêcher les tendons de franchir celle-ci. Le dispositif est complété par dessus la chaussette par une bande élastique velcro (modèle Tarmak de Décathlon) qui entretient la pression nécessaire, constamment réglable.
Attention, cette cale rigide n'est pas sans danger : Si les tendons parviennent tout de même à se luxer, ils seraient alors pincés entre la malléole et la cale, ce qui accroit le risque de lésion. Cette cale ne doit donc pas être utilisée si l'on n'a pas la rigueur de réduire manuellement immédiatement une luxation en retirant la bande, voire le strapping et la cale, pour réinstaller le tout avec les tendons à l'arrière dans la gouttière rétro-malléolaire.
Les jours passant, on peut réussir à limiter le nombre de luxations vraies pour ne plus avoir que des subluxations (réduction spontanée immédiate) de plus en plus rares (une ou deux par jour, souvent dans le lit en fin de nuit dans un demi-sommeil par une contraction puissante et involontaire des fibulaires irrités). Il faut associer au port de la cale une rééducation quotidienne sans la cale mais avec les doigts d'une ou des deux mains retenant fortement les tendons vers l'arrière : amplitude de mouvements, renforcement avec des gros élastiques de bureau. La luxation qui se produisait d'abord au moindre mouvement d'éversion devient plus gérable en ne se produisant que dans un mouvement d'abduction avec flexion plantaire partielle, le mouvement produit lors d'un dérapage sur le ski aval. On peut dès lors travailler ce mouvement spécifique en conservant une main sur les tendons et en tentant de solliciter le rétinaculum sans le déchirer afin qu'il se renforce.
La cale fibulaire rigide est malheureusement rapidement douloureuse. Il est déconseillé de passer outre une douleur prolongée que provoquerait la pression de la cale sur l'os de la malléole car un os soumis à une pression constante peut déclencher une résorption d'origine périostée, le périoste étant ce tissu recouvrant les os et responsable de leur modelage permanent par appositions et résorptions. Si le relief de la malléole existe, c'est qu'il est régulièrement soumis à des tractions par l'intermédiaire notamment du rétinaculum inséré sur elle, tractions qui stimulent l'apposition osseuse périostée. Ici, le décollement du rétinaculum n'assure plus cette fonction, laquelle est remplacée par la pression de la cale favorisant la résorption périostée. Ce risque n'est peut-être que théorique et sans doute négligeable sur une courte durée, mais mérite tout de même d'être signalé pour les durs qui ignoreraient la douleur, afin que ceux-ci en tiennent compte pour éviter de se retrouver avec une crête malléolaire effacée encore plus défavorable pour retenir les tendons fibulaires.
Dès que le nombre de luxations s'est réduit, il faut en conséquence passer à une cale légèrement souple (plastique plus mince prélevé sur une luge sommaire) toujours revêtue de feutrine. Celle cale devient compatible avec le port de chaussures montantes. On remplace alors la bande à velcro épaisse par une orthèse fine (modèle R100 de Décathlon) portée sous la chaussette. Puis on passe à une cale encore plus souple et plus mince fabriquée dans le couvercle plastique d'une boîte de café-chicorée revêtue de feutrine. L'absence totale de cale en revanche, c'est-à-dire un simple strapping conjugué à la bande élastique à velcro ou l'orthèse, est toujours impuissante à retenir les tendons fibulaires qui réussissent à rouler dessous sans obstacle.
Le port de ces différentes cales ne va probablement pas éviter la nécessité de l'acte chirurgical mais permet au moins de se présenter au bloc opératoire avec une cheville dans le moins mauvais état possible, et en attendant, de se conserver en forme par la pratique du vélo et la musculation du haut du corps, en sus de poursuivre une activité quotidienne normale.
III/ LA CHIRURGIE
Généralement ambulatoire, la chirurgie consiste à rattacher le rétinaculum à l'os malléolaire par des fils résorbables après perçage de petits tunnels à travers l'os. On trouve un document d'information aux patients rédigé par l'Association Française de Chirurgie du Pied et de la Cheville en suivant ce lien. Il existe des variantes selon les conditions rencontrées. Les tendons effilochés (généralement le court fibulaire au contact de l'os) sont auparavant réparés et un corps charnu bas situé de ce court fibulaire éventuellement reséqué.
Elle est pratiquée sous anesthésie loco-régionale: 2 injections au creux poplité où le nerf sciatique se divise en nerf fibulaire commun et nerf tibial, et 1 injection derrière la cuisse bloquant le tronc du nerf sciatique. Ces infiltrations d'anesthésique se font sous contrôle échographique. L'anesthésie va durer 20 heures au moins, et souvent davantage, ce qui permet de passer la première nuit après la chirurgie sans douleur. Un accès veineux est posé par sécurité au cas où il faudrait injecter en urgence un produit (antalgique) et un masque de MEOPA est prêt pour compléter à la demande avec une infirmière dédiée aux sollicitations du patient. Un rideau est dressé pour interdire la vue du champ opératoire au patient, ce qui est dommage, mais peut parfois être contourné si l'on a la chance de voir l'opération se refléter dans un scialytique éteint du bloc opératoire.
L'acte chirurgical dure une petite heure. Après une surveillance d'une paire d'heures, on retourne chez soi muni d'une botte de marche de type Maxtrax version haute de Donjoy ou d'une autre marque équivalente (prévoir un pantalon avec une large ouverture par fermeture éclair pour la jambe en cause pour le premier rhabillage car la botte est posée au bloc opératoire par le chirurgien) avec interdiction de porter le poids du corps pendant 4 semaines.
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La botte de la marque française Thuasne équivalente à la Maxtrax |
La botte doit être portée jour et nuit, en permanence, sauf pour les lavages et habillages, pendant 6 semaines. On peut l'ouvrir par moments en restant installé immobile dans un fauteuil avec le pied surélevé. On est autorisé à faire jouer alors les tendons fléchisseurs et extenseurs des orteils, mais pas davantage. Pour limiter l'œdème, il est conseillé de conserver le pied surélevé le plus souvent possible les premiers jours. La consigne à se rappeler est qu'il est important de bien caler le talon au fond de la botte afin que le pied soit à 90° pour éviter sans doute une cicatrisation avec des tendons trop courts !
La douleur est moyenne à importante (environ 5 sur une échelle de 1 à 10) pendant 4 jours et nécessite la prise orale d'Izalgi (association de paracétamol et de poudre d'opium). Une prise systématique de 500mg de vitamine C par jour est aussi prescrite pendant les 6 semaines du port de la botte.
Pour prévenir le risque de phlébite (et donc celui d'embolie pulmonaire), du Lovenox en voie sous-cutanée est prescrit pendant toute la durée du port de la botte, soit 45 jours. Une numération plaquettaire est prescrite chaque semaine. Le pansement doit être refait 3 fois par semaine et il faut bien entendu soigner l'hygiène du pied jusqu'à la fermeture de la suture externe (cicatrice fermée au 18e jour). Les fils sont tous résorbables sauf cas plus complexes ayant nécessité des ancres osseuses qui restent à demeure.
Selon les recommandations du chirurgien, à la 6e semaine, on est autorisé à commencer les séances de kiné. La reprise des sports dans l'axe se fait classiquement à 3 mois, les autres sports plus à risque (escalade, ski, dévaler les pierriers...) à 6 mois.
IV/ LES SUITES OPERATOIRES
Les délais officiels peuvent être raccourcis à la condition de rester à l'écoute de son appareil fibulaire. La consigne la plus importante est de ne pas aller contre la douleur, 2/10 étant, les premières semaines de reprise d'activité, le maximum à ne pas dépasser sur une échelle d'intensité de 1 à 10, afin de ne pas risquer de détruire le travail du chirurgien en tirant trop fort sur le rétinaculum. Le rétinaculum étant un tissu conjonctif riche en collagène (fibres non élastiques) et en élastine (fibres élastiques) qui sont deux protéines, il n'est pas complètement idiot d'éviter toute diète pauvre en protéines et pourquoi pas de s'offrir les en-cas protéinés (whey et caséine) chers aux bodybuilders afin d'optimiser la phase anabolique. Pendant la réparation du tissu, il est donc déconseillé de continuer à suivre un régime grimpeur hypocalorique et conseillé au contraire de proscrire tout jeûne intermittent, très à la mode et certes efficace pour la perte de poids, mais introduisant une phase catabolique préjudiciable à la guérison d'un rétinaculum et de tendons. Le poids corporel va grimper, on reperdra les kilos plus tard...
Voici un cas personnel des délais que l'on peut espérer:
4e jour après la chirurgie: arrêt des antalgiques.
9e jour: disparition de l'œdème de l'avant-pied.
18e jour: cicatrice fermée.
25e jour (au lieu du 28e jour pour la charge autorisée) : un peu de vélo d'appartement avec la botte, très faible charge.
38e jour (au lieu du 45e jour): botte ôtée le jour, marche à l'intérieur.
39e jour: reprise du vélo à l'extérieur, de la moto (enduro) en restant sur la route (passage des vitesses avec le pied gauche opéré relativement aisé).
42e jour: rendez-vous post-opératoire avec le chirurgien sans la botte et sans béquille ; autorisation, de reprendre toutes mes activités en restant à l'écoute de la cheville. Auto-rééducation ou rééducation chez un kiné: récupération du volume musculaire de la jambe, étirements de la chaîne musculaire postérieure, renforcement des fibulaires aux élastiques, amplitudes articulaires, etc.
48e jour: marche sur chemin très irrégulier (avec bâtons de marche), parfait pour la proprioception.
52e jour (au lieu du 3e mois): 17 km en vélo, soutenu.
54e jour: marche en montagne, avec bâtons (Des 3 Fontaines jusqu'à la cabane de Jusson en Chartreuse) à une vitesse presque normale mais plusieurs jours de récupération nécessaires.
V/ CONCLUSION
Un vol d'une affligeante banalité, comme on en fait plusieurs fois par séance en salle d'escalade, peut par une réception malencontreuse sur la malléole externe contre un volume en saillie, entraîner un handicap nécessitant un acte chirurgical et un arrêt du sport (et du travail) pendant plusieurs mois. L'accident n'est pas d'une grande gravité, les résultats de la chirurgie réputés très bons, mais les inconvénients sont suffisamment importants pour s'intéresser à la prévention.
On pourrait imaginer de bricoler des extensions protectrices en cuir aux chaussons d'escalade, ce qui serait assez fastidieux étant donné le nombre de paires que possède habituellement le grimpeur. La meilleure prévention reste encore de diffuser l'information afin d'être conscient des situations à risque (d'où cet article): pas aléatoire en carre externe au-dessus d'un obstacle en saillie. On évitera surtout de plaquer le talon contre la paroi en conservant une angulation entre celle-ci et l'axe du pied pour maintenir une certaine distance entre la malléole externe et le danger potentiel, ce qui, de toute manière, est la bonne pratique pour exploiter la carre externe du chausson qui se situe à l'avant de la semelle et non strictement sur le côté.