Patous: La randonnée plus dangereuse que l'alpinisme? 34

Morsures de patous en montagne
Un gentil chien, qu'il ne faut pas regarder dans les yeux...


Guerre civile sur nos alpages:

La généralisation des patous en moyenne montagne a déjà fait coulé beaucoup d'encre.
Ces chiens agressifs sont laissés en divagation sous la protection de la loi n°2005-157 du 23 février 2005 sur le développement des territoires ruraux (loi dite DTR). Par un complément à l'article L.211-23 du Code rural, cette loi exclut toute poursuite pénale pour divagation d'un chien de protection de troupeau. Ce sont donc clairement les pouvoirs publics qui ont encouragé les éleveurs à s'équiper de ces chiens, et ce depuis 1997. Ce sont également ces pouvoirs publics qui minimisent constamment le nombre et la gravité des agressions et publient régulièrement des plaquettes d'information lénifiantes où le patou est présenté comme un salarié modèle et consciencieux tandis que le randonneur se livrerait à des gestes inappropriés de pelotage des agneaux…

Las! Ce discours extraordinairement fallacieux participe de la guerre sans merci que se livrent l'éleveur des champs et l'écologiste des villes.
Ce dernier a cru bon de s'inviter sur l'alpe en y transportant son idéal de citadin déconnecté des réalités. Le considérable remue-ménage auquel il s'employa sans relâche pour introduire artificiellement dans nos montagnes l'ours et le loup rencontra immédiatement la résistance de l'occupant des lieux. Sous l'alibi de la défense des troupeaux face aux prédateurs à quatre pattes, les éleveurs opposèrent des patous dressés à agresser le randonneur assimilé à l'écolo, tant il est vrai que personne ne peut croire qu'un chien, même très abruti, ne sache faire la distinction entre un loup et un homme.

Cette guerre par proxys, loup d'un côté, patous de l'autre, mettaient en jeu des forces plus considérables que ne semblait l'apparence superficielle des choses. Derrière le vote frontiste du monde pastoral et celui gauchiste du bobo-écolo se cachaient encore les arcanes du capitalisme de connivence, celui que dénonce quotidiennement l'économiste Charles Gave. En effet, le pastoralisme en France est un secteur agricole déficitaire depuis longtemps. Ses acteurs ne vivent que par les transferts massifs que sont les larges subventions annuelles inondant cette fausse économie (voir cette vidéo). Bergers et éleveurs ne dégageant que des revenus modestes, cette manne du contribuable finit forcément dans des poches parasites stratégiquement placées. On comprend mieux alors pourquoi il a été donné un permis de mordre le randonneur et qu'on bafoue chaque été ce droit fondamental qu'est la liberté d'aller et venir puisque de nombreux promeneurs sont obligés de renoncer à leurs balades sauf à perdre une main, un mollet, un enfant…

Si la bataille est en passe d'être gagnée par les éleveurs qui se sont débarrassés dans le sang de l'écolo comptant ses points de suture, la guerre ne fait pourtant que commencer. Jouer un jeu stupide ne conduit généralement pas à des effets louables. On oublia les capacités d'évitement d'une population de vacanciers qui déroulent maintenant leur existence incertaine en mode survie, l'objectif premier étant devenu très prosaïquement de ne pas se faire arnaquer ou agresser une fois de plus d'ici la fin de journée. Rappelons que les deux-tiers des classes populaires ne partent plus du tout en vacances. Les zones de montagnes dont les quelques emplois encore viables perduraient grâce au tourisme sont en voie d'extinction, l'envie d'acheter un produit de l'artisanat local ayant bizarrement passé chez le père de famille dont l'épouse a perdu le quart d'une fesse dans la gueule d'un de ces gentils molosses appartenant au cousin du commerçant…
De même l'hiver prochain, aura-t-il envie de skier à Saint-Pierre de Chartreuse, station sur le fil de la faillite, quand cet été il aura dû interrompre dans la violence d'une agression sa randonnée sur l'alpage de Bellefont? Il est probable que non.


Cet article est le best-seller du blog, comme quoi les Français ont toujours une passion pour la polémique. Nous ajoutons en illustration deux liens montrant les forces en présence.

La pastoralisme en France
Les faux-semblants du pastoralisme en France
très bien décrits par Pierre Rigaux

La pastoralisme en France
Parole à la défense, particulièrement bien structurée…

En pratique, le randonneur ingrat, incapable de sacrifier un mollet pour la cause d'une filière économique qu'il finance avec son propre impôt,  cherchera surtout à éviter de se faire mordre, frisant ainsi l'insolence. Une petite aide avec les enseignements précieux de Nicolas Greveldinger pour 30 Millions d'Amis.


Patous et randonneurs