Pointe du Vallonnet, pilier sud 146

Le Désert en Valjouffrey, hameau perdu sur un cône de déjection de la vallée de la Bonne, acquit son immense réputation alpinistique le 24 août 1934, après que le Fortissimo (Giusto Gervasutti  1909-1946) força avec brio la face nord-ouest de l'Olan en compagnie de l'ambitieux Lucien Devies. Bien sûr, la tentation était trop grande pour que le non moins ambitieux René Desmaison n'entreprenne en 1956 de "rectifier" l'itinéraire en ouvrant cette fois la directissime du sommet Nord. La voie qu'il traça avec Jean Couzy du 3 au 5 août attira et attire encore les fortes cordées du monde entier qui tentent avec plus ou moins de succès de répéter l'exploit du maître. Le Dévoluard revint en 1960 pour s'adjuger la première hivernale de la voie de 1934, en nombreuse compagnie (Audibert, Payot, Puiseux), le portage du matériel dans la neige profonde depuis Le Désert s'apparentant aux approches himalayennes... Malheureusement, cette face nord-ouest connut récemment de méchants éboulements dans ces deux voies, la voie Gervasutti surtout n'étant plus guère fréquentable pour cause de rochers instables. La tentative du PGHM de réouvrir la voie au début des années 2000, se soldant par une évacuation par hélicoptère, refroidit un tantinet les répétiteurs malgré le topo très détaillé de leur tentative consigné sur le livre du refuge de Font Turbat.
Pour l'escaladeur plus ordinaire, ce lieu chargé d'histoire propose des ascensions plus raisonnables. On peut conseiller la voie normale de l'aiguille d'Olan (PD), la longue traversée de l'Olan par l'arête Nord (PD) avec descente de la voie normale vers le refuge de l'Olan puis retour par le col Turbat, ou les escalades sur le granit fiable de la Pointe du Vallonnet pour ceux qui seraient lassés des empoignades de la Dibona surfréquentée. Dans les années 2010, Pascal Huss a spité plusieurs voies anciennes au grand dam des amateurs de courses classiques. Ceux-ci pourront encore se tourner vers la Chave-Ferber de la face sud-ouest (TD+), voie de 1973 que nous avions trouvée relativement exposée quand nous l'avions parcourue en 2003 mais qui mérite d'être laissée intacte, sinon les pitons non récupérés par les très rares répétiteurs.
La voie du pilier sud, ouverte le 4 août 1970 par C.Amblard, J.P.Froment et J.Salomon, vaut un parcours. Courte (7 longueurs puis un final rapide sur l'arête facile), maintenant spitée intégralement, ce qui élimine toute incertitude d'itinéraire, elle ressemble encore un peu à une course d'alpinisme à la condition de la traiter comme telle: pas de dépose des crampons, piolets, chaussures au pied de la voie pour s'habituer à grimper avec un vrai sac, pas de descente en rappels dans la voie, sommet atteint, et descente par la voie normale. Celle-ci est intégralement cairnée, avec d'énormes cairns parfaitement immanquables. La course permet de s'exercer sans engagement sur une montagne peu fréquentée, avec tout de même deux longueurs (L3 et L6) raides difficiles en excellent rocher. Le tout dans l'ambiance de la célèbre face nord-ouest de l'Olan, très proche, imposant sa masse impressionnante derrière l'éperon sud-ouest de la Pointe Maximin.


On évitera toute complication en emportant le classique rappel 2 x 50m qui permet de redescendre facilement à tout moment, de mieux gérer le tirage et de hisser commodément un sac. Pour s'alléger, on peut choisir une corde multilabel (45m suffisent), en ajoutant une cordelette de rappel (ici 30 m seulement pour diminuer le poids) au cas où il faudrait impérativement redescendre la voie en rappels (blessure par chute de pierre, météo, etc.) ou hisser le sac (il faudra alors que le premier de cordée parcoure 5 mètres avant  de déposer son sac sur un spit d'une longueur de 35m).

On distingue le fameux bloc en bec d'oiseau, déjà photographié en 1903 sur un cliché montrant le Commandant Henry et Madame Cerf. Malgré les menaces des panneaux du sentier, aucun patou ne pointera ses crocs et son cerveau malade ce jour-là...

Pointe du Vallonnet, pilier sud
Il est conseillé d'aller bivouaquer aux ruines de la Cabane du Petit Vallon sans passer par le refuge de Font Turbat. Il faut quitter le sentier de Font Turbat à gauche après la cabane du Châtellerat.


Pointe du Vallonnet, pilier sud


Il est inutile de se lever tôt car les pentes de neige de la voie normale sont débonnaires.

Le pilier est redressé. On grimpe vraiment...


Pointe du Vallonnet, pilier sud, début de la deuxième longueur



L'omniprésence de l'Olan

Le sommet

Le rappel conduit à un couloir facile à désescalader (la voie normale est cotée F). Puis une longue traversée descendante vers la gauche permet de rejoindre le haut des pentes de neige.

Celles-ci ne sont pas raides.

Voici le tracé de la descente par la voie normale. Elle est si facile, rapide et bien indiquée, qu'il n'y a aucune raison de tenter de descendre sur l'autre versant côté Petit Vallon.




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Extrait de la carte d'Henry Duhamel (domaine public) - La Pointe du Vallonnet est une sorte de gendarme de l'Aiguille Rousse.

L'autonomie consiste à emporter trop de matériel. La rapidité suppose de ne pas en emporter assez. Il vous revient de positionner le curseur selon votre humeur du moment.


Bonus: Petites réparations de la tige des chaussures
Un collier de chaussure décousu est une avarie maintenant courante. Si les chaussures italiennes sont sans conteste les meilleures, elles sont aussi devenues fragiles, et les petites réparations sont à la portée de l'alpiniste entre deux courses.
Les usures importantes peuvent être résolues avec un mastic-colle de type Seam Grip de MacNet, ou un mastic-colle du commerce, de préférence transparent.


Les coutures rompues ne peuvent en revanche se contenter d'un simple collage. Il faut coudre. Les plaisanciers ont trouvé depuis longtemps la solution pour réparer les coutures des multiples épaisseurs des chutes et guindants de leurs voiles sans casser l'aiguille ou se blesser. Ils utilisent la machine manuelle de Stewart MFG, Inc. nommée The Speedy Stitcher, qui permet de traverser sans effort les matériaux les plus coriaces, cuirs ou plastiques compris.


Le mode d'emploi est très simple. Une première traversée de l'aiguille permet de faire passer l'extrémité du fil à l'intrados du matériau cousu. On tire alors une longueur supérieure à la longueur de la couture prévue. Cette longueur va servir de fil intérieur, comme le fil de la canette d'une vraie machine à coudre. Après retrait de l'aiguille, on pique le trou suivant à fond. Au nouveau retrait partiel, une boucle se forme à l'intrados, dans laquelle on passe l'extrémité du fil intérieur. Puis on procède au retrait complet de l'aiguille pour passer au trou suivant. Et ainsi de suite jusqu'à la terminaison de la couture. Celle-ci se fait en coupant le fil extérieur quand il est passé à l'intrados afin d'avoir les deux extrémités du même côté du matériau. Ils sont ensuite noués.
Le fil employé (livré avec la machine) est une petite ficelle cirée très solide, ressemblant au fil à surlier des plaisanciers.


Il est préférable de protéger la couture en l'enduisant d'une couche de mastic-colle qui assure aussi son étanchéité.


Quand la Faculté est en proie à une crise totalitaire...










Le côté méridional de l'Olan


Personnages à partir de dessins de René Vincent et de Mars (collection Jaquet, Gallica.bnf.fr)