Permis d'ascension au Mont-Blanc 35
Eté 2011 |
Un élu atrabilaire:
Cet été 2003, Jean-Marc Peillex, maire de Saint-Gervais, se rend au sommet du Mont-Blanc en compagnie du préfet de région. Il y feint de découvrir un sol jonché d'urine et d'excréments et de trouver matière à justifier ses pulsions autoritaires et liberticides.
Le comploteur avait bien entendu choisi le cœur de la canicule de cet été 2003, profitant d'une fonte de neige exceptionnelle qui ne pouvait que révéler que l'être humain alpiniste possède bien un appareil digestif et un autre urinaire, cloaques qu'il n'a pas su, malgré sa détermination et toute sa bienveillance pour la planète, obturer de façon définitive…
La confiscation de la montagne par quelques uns:
Plutôt que de prendre la décision de faire monter des toilettes sèches, ou bien encore de profiter de la construction du nouveau refuge du Goûter (commencée en juillet 2010) pour y prévoir des toilettes multiples accessibles aux personnes extérieures au refuge (la Haute-Savoie est un département riche), l'édile partit en croisade contre la liberté de ses concitoyens, profitant de la tendance xénophobe de certains électeurs de la vallée de Chamonix, l'étranger chez ces gens-là Monsieur - y compris pour les riches imports-exports récents - commençant à la vallée voisine… L'infernal processus d'appropriation de la haute-montagne chamoniarde déclenché dès 1821 avec la création de la Compagnie des guides de Chamonix, se mit de nouveau en branle.
La mairie commit alors un certain nombre d'arrêtés interdisant ponctuellement l'accès au Mont-Blanc sous différents prétextes: la pesanteur qui ferait tomber des pierres, la pollution du globe terrestre, les paroles impolies qu'échangeraient les alpinistes, le modèle inapproprié des chaussures utilisées… On créa même une liste contraignante de matériel obligatoire, chose que dans toute la littérature alpine aucun auteur de manuel technique d'alpinisme ne s'est jamais cru autorisé de faire, sachant bien que ce sont les circonstances, les conditions, la période de l'année, le nombre d'alpinistes dans la cordée, leur expérience, qui modulent le contenu du sac. Mieux, le maire menaça le préfet qui défendait la liberté de ses concitoyens de procédure pénale, obtenant par ses chantages des arrêtés préfectoraux.
De sottise en stupidité, on arriva à cette réunion du début septembre 2018 à Annecy où l'on acta le principe d'une réglementation permanente et d'un permis pour l'ascension du Mont-Blanc par l'arête des Bosses que les marchands appellent maintenant bêtement "voie royale" pour accroître leurs profits. (Cette appellation est parfois utilisée pour la traversée aiguille de Bionassay - dôme du Goûter - Mont-Blanc et non pour la voie normale du Goûter.) Ce permis ne sera délivré qu'à ceux qui auront une réservation en refuge en bonne et due forme avec une limitation à 214 alpinistes par jour. Il est évident que les cordées sans guide et les guides extérieurs à la vallée seront pénalisés les premiers.
Favoriser la mauvaise pratique:
Ce permis aura le mérite d'être clair. Il garantira cette fois qu'aucun alpiniste parcourant cette voie normale ne respectera les rudiments d'une bonne pratique.
L'explication est simple. Le choix de se lancer dans une ascension est essentiellement déterminé par les conditions de la montagne. Or, il est impossible de connaître ces dernières lorsqu'on réserve un refuge plusieurs mois à l'avance.
Eliminer la bonne pratique:
Parmi les candidats au Mont-Blanc, il restait quelques cordées sans guide qui se décidaient au dernier moment, profitant des jours d'attente du bon créneau météo pour parfaire leur acclimatation à l'altitude en grimpant par exemple à la dent du Géant ou au Mont-Blanc du Tacul avec une nuit ou deux à Torino ou aux Cosmiques. Une fois le créneau météo assuré, elles montaient bivouaquer car les réservations étaient closes depuis longtemps. C'étaient elles qui avaient la bonne pratique. Et ce sont elles qu'on désigne comme des pestiférées et qu'on va chasser définitivement de la voie normale du Mont-Blanc alors qu'elles montraient ce qu'il faut faire.
Avec nos étés à la météo de plus en plus chaotique, prévoir plusieurs mois à l'avance une ascension en haute-montagne est une ineptie. La dénonciation de cette bêtise crasse avait pourtant fait le succès d'un film comme Vertical Limit quand le salaud milliardaire du scénario prévoyait de saluer l'avion de sa compagnie aérienne au sommet du K2 à une certaine heure pétante… Ce milliardaire cupide comme notre maire agité se disent fiers de ce qu'ils ont accompli...