Tête de Lauranoure, voie normale du sommet central 144

La Tête de Lauranoure, nommée Montagne de Dourounoure (montagne noire) sur l'ancienne carte de Bourcet, est cette montagne qui fait face au village de Saint-Christophe en Oisans. De ses trois sommets, le sommet central est le plus élevé (3325m). Cette faible altitude est une garantie de trouver dès le début de saison les rochers terminaux secs. Il ne faut pas tarder pour parcourir sa voie normale, ni en terme de saison, ni en terme d'horaire, car le retrait glaciaire a formé une petite barre rocheuse (déjà présente sur une photographie datant de 1900) coupant la branche occidentale du glacier du Pierroux à son endroit le plus redressé, et la pente de neige immédiatement au-dessus de cette petite barre est raide et surtout instable si la couche de neige est mince et ramollie par le soleil.

Une cordée peu expérimentée, pour rester en sécurité, doit en conséquence choisir un jour avec isotherme 0° bas, partir très tôt, et ne pas s'égarer dans les vernes et les éboulis de la marche d'approche. Aussi est-il intéressant d'effacer ce risque de perdre du temps dans une approche nocturne en allant installer son bivouac au pied de la moraine (c'est-à-dire au bas des premières pentes de neige ce 27 juin).

Extrait de la carte de Pierre Bourcet (1700 Briançonnais-1780 Meylan), dressée dans les années 1749 à 1754 (Ingénieur géographe du roi: capitaine Jean Villaret)


En tenant compte de cet impératif, la course est tout à fait recommandée. Les rochers terminaux, formés d'un beau granit rugueux fracturé, ont beaucoup d'allure et, à la condition de ne pas s'éloigner du fil de l'arête, sont sains et faciles à protéger par le simple cheminement de la corde ou en coiffant les nombreux becquets par des sangles (deux petits friends peuvent être utiles). Le panorama depuis le sommet est splendide, depuis le vallon de Lanchâtra à la Meije, depuis la Roche de la Muzelle au Sirac: On voit tout l'Oisans!  Au retour, la petite barre rocheuse lisse coupant le glacier, presque impossible à protéger, se désescalade d'abord facilement face au vide, en choisissant le fond des petits dièdres plutôt que les bombés exposés, et en utilisant l'adhérence de toutes les surfaces du corps (pieds, fesses, paumes, coudes) comme on le fait souvent en granit, puis peut se conclure par un petit rappel de 20 mètres qui franchit également la rimaye (relais en place: 3 pitons et un coinceur câblé - prévoir cordelette, canif et marteau pour refrapper les pitons).

En évitant de choisir un week-end, il ne devrait pas y avoir affluence dans la course.


Tête de Lauranoure, voie normale: le passage délicat

Hameau des Granges et cascade de la Froide Pisse. Le sentier menant au refuge de l'Alpe du Pin monte en lacets à gauche. 

Un bivouac aussi bas mérite d'aller explorer et cairner la suite de l'itinéraire la veille de la course.


L'aiguille du Plat de la Selle, omniprésente (voir l'article 121 pour sa voie normale depuis le Soreiller)

Essayez d'être ici alors qu'il fait encore nuit.


En agrandissant le cliché, on voit l'endroit où les rochers terminaux sont abordés, bien à gauche du fil.


Les rochers terminaux sont très agréables, légèrement aériens.




Tête de Lauranoure, voie normale

Décrassage dans le Vénéon, face à la Tête des Fétoules


Topos:
Guide du Haut-Dauphiné, tome 3 - GHM/François Labande - Editions de l'Envol, 2008.
Sommets des Ecrins, les plus belles courses faciles - Frédéric Chevaillot, Paul Grobel, Jean-René Minelli - Glénat éditeur, 1997.
Alpinisme facile dans le massif des Ecrins - Chevaillot, Grobel, Minelli - Glénat éditeur, collection Montagne-évasion, 2006.

Une approche un tantinet alambiquée. Faire mieux...

Voie normale de la Tête de Lauranoure, matériel conseillé


Extrait de la carte d'Henry Duhamel (1853-1917)

Bonus: Quels gants pour l'alpinisme d'été?

Commençons par la mauvaise nouvelle: la meilleure saison pour trouver une paire de gants convenable et bon marché est la saison de ski. En été, vous ne trouverez plus que des gants conçus pour l'alpinisme et vendus très chers dans des magasins spécialisés.
Le gant de ski de piste le plus simple est en effet le meilleur choix. Les caractéristiques recherchées sont les suivantes:
- Entièrement fabriqué en matières synthétiques pour un séchage rapide.
- Epaisseur et solidité suffisantes pour protéger la main des blessures contre les crampons (pendant une désescalade de rocher où les mains s'approchent toujours dangereusement des pieds, ou lors d'une glissade en neige).
- Bonne isolation thermique, ce qu'offrent la plupart des gants de ski classiques. Eviter donc les gants fins.
- Absence de complications de toutes sortes: renforts rigides, boucles de serrage rigides, etc., qui alourdissent et rigidifient le gant sans aucune utilité.
- Elastiques de poignets pour pouvoir quitter les gants le temps d'un pas d'escalade délicat sans devoir les ranger.
- Tissu intérieur permettant un enfilage et un déshabillage facile et rapide même avec la peau humide, sans tendance à entraîner et retourner la doublure. Ce critère est tellement essentiel qu'il est conseillé de venir en magasin muni d'une petite fiole d'eau afin de faire le test. Cracher dans sa main est un mauvais palliatif car la viscosité de la salive ne crée pas des frottements aussi importants que l'eau pure.
- Tissu de la paume en matière anti-dérapante suffisamment efficace pour ne pas glisser le long d'un manche de piolet de métal nu.
- Souplesse générale du gant permettant de serrer un manche de piolet sans devoir vaincre une résistance, critère généralement totalement loupé pour les gants spécifiques à l'alpinisme autres que des gants trop fins.

Pour les courses sérieuses (mais pas en face nord), on peut prévoir une paire de gants de rechange légère en fourrure polaire, au cas où, dans un souci de poids total du sac.
Et pour le cuir, c'est à l'article n°30.
Les petits accrocs peuvent être réparés rapidement avec la colle Seam Grip de McNett ou un mastic-colle polyuréthane trouvé en magasin de bricolage.