Voie normale des Rouies en fin de saison 202
Du bivouac, on voit les premiers cairns se dirigeant vers la base - qu'il faut franchir - de l'arête sud du pic Ouest du Vaccivier (une arête qui est pour nous un souvenir déjà ancien de 2004 -1ère ascension par A.Gendarme et C.Picard en 1972, AD rocher, conseillée), mais il faudra surtout revenir dans quelques années pour parcourir la voie de 1935 du professeur de Gaston Rébuffat et rédacteur avec le commandant Pourchier du manuel d'alpinisme de 1943-46: Edouard Frendo, une belle "exploration" comme aimait qualifier Henry Duhamel (dont le nom est parfois donné au pic Ouest du Vaccivier car il en fit la première ascension en 1878 par le col de la Muande Bellone) ses sorties en montagnes (lire sa biographie récemment augmentée à notre article n°70), où l'on se perd en général longuement de nuit dans le socle avant de rattraper le retard sur l'éperon franchi quatre à quatre à corde tendue, souvenir de 2010 (AD rocher, 900m donc engagement non négligeable, prévoir de quoi redescendre en cas d'échec: pitons, cordelette, canif).
![]() |
Frendo accompagna notamment son talentueux élève Rébuffat dans la 2e ascension de la "Walker", voie Cassin de 1938, en juillet 1945. Quand l'élève dépasse le maître, c'est que le maître est bon... |
A la mi-septembre, le soleil se levant tard, il est inutile de régler le réveil avant 5 heures pour un départ à 6 heures du bivouac, soit une heure de marche nocturne. Ceci à la condition de bénéficier d'un bon regel par un isotherme bas, bien inférieur à 4000m. Il faut d'abord suivre un long cheminement ascendant vers la gauche tout en passant à proximité du bas de l'arête sud du Pic Ouest du Vaccivier et poursuivre jusqu'à buter sur une paroi rocheuse zébrée de noir. On se trouve alors au pied du long couloir plus raide, en ascendance vers la droite.
La sente (couloir de neige en début de saison) suit le fond du couloir, plutôt à gauche, jusqu'à parvenir au névé résiduel. Plutôt que de chausser ses crampons pour une courte durée, il est préférable de ne pas manquer deux petits cairns à droite, marquant un passage commode sur la rive gauche (c'est-à-dire à droite en montant) , ce qui permet de contourner le névé par la droite par une succession de rampes caillouteuses et de petites dalles rocheuses faciles.
Le glacier se remonte par un long mouvement tournant qui va d'abord vers la droite à proximité des rochers tombés de sa rive gauche ("Ce qui est tombé n'est plus à tomber" disait en substance le coriace André Bertrand à René Desmaison à leur première tentative de la face nord de l'Eiger quand des énormes blocs de rocher animaient leur retraite...), pour revenir bien plus haut vers la gauche par une trace suivant, mais beaucoup plus bas, la rimaye. Celle-ci se franchit invariablement à gauche. Ce 18 septembre 2025, elle était à peine ouverte, preuve que l'été n'a pas été sec au contraire des dires quotidiens de nos propagandistes complices.
Le passage de la rimaye ainsi que la petite pente de neige raide immédiatement au-dessus est le second passage où il faut être attentif et précis. On peut laisser l'un des bâtons télescopiques - voire les deux - plantés solidement dans la neige pour manier plus facilement le piolet. On les retrouvera au retour. La corde n'a pas de mou dangereux au passage de la rimaye grâce à une progression du second qui accompagne soigneusement le rythme du premier de cordée. Celui-ci va bien vite se réfugier sur l'arête rocheuse à gauche pour se caler efficacement afin d'assurer le second à l'épaule.
![]() |
La rimaye est très belle. Ce n'est bien sûr pas là qu'on la franchit... |
![]() |
...mais ici. |
Quelques rochers enneigés faciles mais raides, c'est-à-dire ce qu'on appelle un passage de "mixte", restent à franchir pour arriver enfin au sommet où la vue, comme depuis la totalité des sommets du massif des Ecrins est immensément étendue. Vous voyez la planète entière et constatez qu'elle se porte toujours très bien, au contraire de vos libertés...
![]() |
René Vincent girl va sortir le mérité casse-croûte... |
![]() |
La vue à l'endroit: trop facile |
___________
1ère ascension des Rouies en nombreuse compagnie britannique et leurs guides suisses (Cox, Gardiner - promoteur et précurseur de l'alpinisme sans guide, Pendlebury, Taylor, Baumann H. et P., Knubel, Lochmatter) le 19 juin 1873.
Cotation: F Dénivelé du refuge du Pigeonnier au sommet: 1166 mètres. Horaire depuis notre bivouac en prenant son temps: 4h30
Matériel conseillé:
- Baudriers légers de ski-alpinisme
- 3 broches à glace pour la cordée
- 4 mousquetons et 2 mousquetons à vis par personne
- 4 grandes sangles et 2 petites sangles pour la cordée
- 1 prusik par personne, voire un ti-block ou petite poulie autobloquante
- 1 piolet par personne, crampons
- 2 bâtons télescopiques par personne
- 1 brin de corde à double 50m
- 3 friends petits et moyens si la cordée est débutante
- vêtements chauds selon isotherme 0°
- lunettes de soleil
- trousse de secours
- morceau de carte IGN au 1/25000e, topo, boussole (à ne pas négliger par temps de brouillard sur un glacier plat, étendu et sans repères), montre-altimètre
- vivres de course, gourde
- lampes frontales rechargées
- appareil photo